Pourquoi devenir propriétaire devient de plus en plus compliqué ?

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"Quand je serai grand, j’aurai une maison” si pour nos parents, devenir propriétaire était presque une certitude, aujourd’hui, pour beaucoup de jeunes, la réalité est bien différente. 60 % des jeunes adultes pensent que leur situation sociale est moins favorable que celle de leurs parents, un chiffre multiplié par quatre depuis 2002 (Odoxa pour Nexity et BFM Business). Mais pourquoi l’accès à la propriété est si compliqué de nos jours ?
60 % des jeunes se sentent moins bien lotis que leurs parents en matière de logement (Odoxa, 2025).
Entre 2001 et 2020, les prix dans l’ancien ont été multipliés par 2,3 (source Insee).
Acheter 100 m² demande l’équivalent de 15 ans de revenus, soit 5 ans de plus qu’il y a 20 ans.
Les dons familiaux et héritages sont de plus en plus importants pour accéder à la propriété.
Des jeunes qui se sentent exclus du jeu
En France, la propriété est un symbole fort. Pour les classes moyennes, posséder son logement reste l’illustration ultime de réussite sociale et de sécurité. Selon les données de l’Institut Montaigne, en 2025, 8 Français sur 10 continuent de rêver de devenir propriétaires, et 70% d’entre eux considèrent l’achat d’un logement comme une étape essentielle de la vie.
Pourtant, entre l’ambition et la réalité, l’écart se creuse : seulement 52 % des ménages français sont propriétaires, contre 69 % en moyenne dans l’Union européenne (Eurostat, 2023). Et pour les plus jeunes générations, le chemin semble encore plus escarpé. Selon le Baromètre du logement Odoxa pour Nexity et BFM Business), 60 % d’entre eux pensent que leur situation sociale est moins favorable que celle de leurs parents, un chiffre multiplié par quatre depuis 2002. Cette difficulté d’accès à la propriété n’est pas seulement une question de revenus ou de situation sociale, elle reflète aussi un marché de plus en plus tendu.
Des logements rares et souvent hors de prix
Qu’est-ce qui explique ce décalage entre les générations ? La faute à l’inflation. es prix ont littéralement flambé ces dernières années. Entre 2001 et 2020, ils ont été multipliés par 2,3 en France métropolitaine (source Insee), tandis que les salaires, eux, sont restés à la traîne. À l’heure actuelle, pour acheter le même bien qu’en 2000, il faut s’endetter sur 25 ans, contre seulement 15 ans à l’époque. En pratique, selon les données de l’Institut Montaigne (2025), au niveau national, il faut mobiliser en moyenne 15 ans de revenus pour acheter 100 m², soit cinq ans de plus qu’il y a vingt ans.
Et le problème ne se limite pas aux prix. L’offre de biens reste très réduite, surtout dans les zones tendues et pour les logements les plus recherchés. Même en étant prêt à s’endetter, le choix reste limité et les biens disponibles partent souvent au-dessus du prix moyen… “Dans mon secteur, très recherché, une maison vaut aujourd’hui environ 60 000 € de plus qu’il y a quinze ans. Acheter dans ce quartier est aujourd’hui beaucoup plus compliqué et plus coûteux” explique Thomas, acheteur en métropole lilloise.

Crédit immobilier : l’apport familial, un levier incontournable ?
Pierre Chapon, cofondateur de Pretto, explique :
“Quand on dit 15-20 % d’apport demandé par les banques, ce n’est pas exactement comme cela. Si vous achetez plus petit, la banque peut se contenter de 10 %. Mais en pratique, les *montants d’apport sont aujourd’hui relativement élevés*”.
Un petit apport peut changer la donne et ouvrir la porte d’un projet immobilier réaliste. “Même 5 000 ou 10 000 €, ça peut faire la différence aux yeux d’une banque. Quand on voit que le taux d’épargne des Français est énorme, on se dit que dans beaucoup de familles, c’est envisageable”, note le cofondateur de la fintech.
Dans les grandes villes comme Paris, l’accès à la propriété sans soutien familial relève presque de la mission impossible. “Je ne connais pas de personne de mon âge n’ayant pas été aidée pour devenir propriétaire à Paris”, expliquait Lucie, jeune propriétaire dans la capitale, au micro du Monde en avril 2025. De quoi se demander comment les jeunes générations pourront un jour franchir le pas de la propriété sans l'appui de leurs parents…
Pourtant, un autre horizon se profile : dans les décennies à venir, beaucoup de Français pourraient hériter d’une partie du patrimoine de leurs parents. En France, selon une étude de la Fondation Jean-Jaurès, d’ici 2040, environ 9 000 milliards d’euros de patrimoine devraient être transmis entre générations, dont une part importante en biens immobiliers. Cette transmission massive provient surtout des baby-boomers, qui ont pu acquérir leurs logements à des prix plus abordables et voir leur valeur s’envoler au fil des années.
Alors que les inégalités d’accès à la propriété s’accentuent, la vraie problématique n’est peut-être pas de savoir si l’achat d’un logement est possible ou non, mais plutôt de réfléchir à la manière d’envisager un projet immobilier réaliste malgré ces obstacles. Parce qu’au final, même dans un marché tendu, le rêve de devenir propriétaire reste à portée de main… pour ceux qui savent anticiper et se faire accompagner.