Quel avenir pour les taux si Bayrou quittait le gouvernement ?

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La décision de François Bayrou de solliciter un vote de confiance à l’Assemblée nationale a semé le doute. Et les répercussions ne se sont pas fait attendre : nervosité sur les marchés financiers, hausse des obligations d’État… et l’inévitable question : jusqu’où les taux de crédit immobilier vont-ils monter ?
Le vote de confiance de Bayrou inquiète les marchés : l’OAT 10 ans a déjà bondi de +0,20 point, signe d’une nervosité accrue.
Même si les banques suivent ce baromètre, la hausse n’est plus automatique comme avant.
Des garde-fous existent : la BCE est rassurante (inflation à 2 %, taux directeurs stables), le système bancaire reste solide et certaines banques continuent de cibler les emprunteurs et notamment les primo-accédants.
Le vrai danger, c’est la durée de l’instabilité : une dégradation de la note française ou un blocage politique prolongé pourraient relancer la hausse des taux.
Vote de confiance : quand la politique met les marchés en alerte
Depuis la flambée de 2022 et 2023, les taux immobiliers avaient retrouvé un peu de calme, amorçant une lente décrue. Mais la nouvelle crise politique de cette fin d’été vient bousculer ce fragile équilibre. L’annonce du vote de confiance a déjà provoqué un sursaut sur le marché obligataire : l’OAT 10 ans (le taux auquel l’État français emprunte) a déjà bondi de 0,20 point en quelques jours.
Or, ce baromètre sert de référence aux banques. Quand il augmente, cela se répercute mécaniquement sur leurs propres grilles de crédit. De quoi donner quelques sueurs froides aux acheteurs... En juin 2024, la dissolution de l’Assemblée nationale avait déjà plongé le marché dans l’attente et suscité une réaction immédiate sur l’OAT 10 ans. Alors en cette rentrée 2025, on craint le même scénario, car qui dit incertitude politique dit généralement attentisme des ménages et fébrilité des investisseurs.
Sans compter que si l’instabilité se prolonge, la Banque centrale européenne (BCE) pourrait aussi être tentée de remonter ses taux directeurs (taux auxquels la Banque centrale prête de l’argent aux banques), ce qui renchérirait mécaniquement le crédit... Bon, on en n’est encore pas, mais il est clair qu’à court terme, le climat soulève des questions
Pourquoi les taux peuvent rester sous contrôle ?
Si la politique joue les trouble-fêtes, les taux de crédit ne se laissent pas si facilement emporter dans la tempête. Premier constat : certes, l’OAT 10 ans reste une référence pour les banques, mais depuis quelques années la corrélation avec les taux immobiliers s’est affaiblie.
Pourquoi ? Car aujourd’hui, même si l’État emprunte plus cher en période de crise, cela ne se traduit plus automatiquement par une hausse des taux immobiliers et parce que la relation entre l’OAT 10 ans et les taux s’est un peu distendue. Preuve en est, lors de la chute du gouvernement Barnier, fin 2024, les conséquences sur les emprunts d’État étaient restées limitées, les banques n’ayant pas suivi l’évolution du cours de l’OAT.
En dépit du contexte politique français et européen, la BCE se veut d’ailleurs plutôt rassurante : “les risques de chute de gouvernement dans tous les pays de la zone euro sont préoccupants" a souligné Christine Lagarde cette semaine. Pour autant, la présidente de la BCE estime que “le système bancaire français est bien capitalisé et n'est pas la source de risque actuel”.
Côté banque, si la plupart ont atteint leur quota de production de crédit et n’ont plus de raison de multiplier les offres pour attirer des clients, d’autres continuent de proposer des offres ciblées, notamment pour les primo-accédants (ces acheteurs qui deviennent propriétaires pour la première fois ou qui n’ont pas été propriétaires depuis 2 ans). Si des ajustements de grilles sont à prévoir, on ne prévoit pas pour autant une fermeture du robinet des crédits.
À moyen terme : quelles menaces pour le crédit immobilier ?
La vraie menace viendrait d’un scénario d’instabilité prolongée. Premier test : le verdict de l’agence de notation Fitch, attendu le 12 septembre prochain. Si l’agence était amenée à dégrader la note souveraine (qui reflète la solvabilité et la capacité à rembourser les emprunts d’un pays) de la France, cela pourrait être perçu comme un signal négatif par les investisseurs, accentuant leurs doutes sur la capacité du pays à tenir ses engagements budgétaires. Un signal d’alerte inquiétant pour l’économie française qui risquerait d'entraîner une hausse des taux d’emprunt immobilier.
À plus long terme, il est possible que l’absence de budget 2026, une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale voire l’approche des élections présidentielles puissent à nouveau tirer les taux vers le haut. Un scénario qui reste à nuancer puisque plusieurs facteurs pourraient freiner la hausse des taux immobiliers, comme la politique de la BCE ou encore l’inflation qui reste maîtrisée.
En bref, la chute du gouvernement Bayrou pourrait créer des remous sur les marchés. Mais de nombreux facteurs viennent contrebalancer les incertitudes qui pèsent sur le pays.